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Je dirai à mon fils... Par Delphine de Vigan


Mon fils est né le 12 juillet 1998, jour de la victoire de la France en coupe du Monde. Il y a quelques jours, nous avons regardé ensemble un documentaire sur cette journée. La chronique - heure par heure- de cette victoire, et de la joie phénoménale, explosive, qui s’ensuivit. Je me disais que c’était important, pour mon fils, de savoir qu’il était né un jour de liesse populaire. Un jour où les gens dansaient et s’embrassaient dans la rue. Un jour où l’on se promettait de savoir vivre ensemble… Mon fils a reçu dans son berceau un ou deux FootiX, petite peluche emblématique de ce Mundial organisé à Paris. On lui promettait un avenir de footballeur.

Dans quelques jours, mon fils aura 20 ans. Il s’intéresse à l’histoire et à la géopolitique.

Assez peu au football, beaucoup à la Russie. On dit parfois que les jeunes ne s’intéressent à rien, ce n’est pas vrai. Les jeunes perçoivent les dangers du monde et ils ont peur de Vladimir Poutine. Dans quelques jours, alors que la coupe du Monde bat son plein en Russie, mon fils découvrira peut-être qu’un cinéaste ukrainien nommé Oleg Sentsov est mort dans une prison de Sibérie, après une longue et atroce grève de la faim. Mort pour ses idées. Mort d’avoir protesté contre son propre emprisonnement et celui de soixante-dix autres prisonniers politiques. Je dirai à mon fils que j’ai signé des pétitions, comme la plupart de mes amis. Que des artistes et des intellectuels du monde entier ont tenté de sauver Oleg Sentsov mais que Vladimir Poutine est resté sourd à leur supplique.

Aujourd’hui, le 4 juillet, malgré l’état très critique dans lequel Oleg Sentsov se trouve, j’essaie de croire qu’il est encore temps et que cela n’arrivera pas. Qu’une si terrible nouvelle n’entachera pas le monde. Et que le 13 juillet, Oleg Sentsov fêtera ses 42 ans.

Delphine de Vigan

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